En
préambule à un bilan vinique de l’année 2018, quelques confirmations lors de
ces 52 semaines écoulées : des retrouvailles et des surprises, parfois agréables,
d’autres plus désagréables, avec des déceptions marquées. C’est le propre de l’homme.
Rien n’est jamais acquis, y compris (surtout) en « amitié ». L’avenir
nous apportera sans doute des explications et/ou des confirmations d’impressions
laissées par 2018 !
Bilan
de cette année 2018 qui avait débuté avec le Salon des Vins de Loire à Angers.
Une sélection toute personnelle, difficile à rendre synthétique tant nous avons
bu de belles (et exceptionnelles) choses !
Pour les blancs
Dégusté au Grand Tasting, Chablis, Grand Cru
Preuses 2003, Cave de la Chablisienne : nez sur une aromatique très originale,
marquée par des notes cétoniques plutôt élégantes et une fraîcheur superlative.
Volatils élégants j’ai noté sur le coup ! Bouche charnue, grillée,
tannique, … qui laisse une impression minérale / acide exacerbée. Quelle
énergie (aucune molécule de mollesse pour ce 2003). Persistance ultime.
Bu à table chez notre
Pampo national, Chassagne-Montrachet,
premier cru les Caillerets 2012, Marc Colin : robe jaune claire, transparente. L’étoffe d’un
grand (cru). Elégance ultime sur des fragrances de noisettes fraîches, de notes
mentholées, de grillé élégant. Bouche énergique, tellurique, mais sur un
substrat très fin, floral, frais, allongé. Vibration sur la durée. Pointe de
fine acidité qui allonge l’ensemble. Jeune aujourd’hui, mais quelle promesse.
Bu à « l’Hostellerie
de Levernois » (merci Nicolas) Meursault,
premier cru les Perrières 2000, domaine Potinet-Ampeau : le
vin présente une robe jaune dorée assez évoluée. Premier nez un peu retenu,
mais qui va s’ouvrir très rapidement. Minéralité et floralité, belle trame
acide, une impression de force tellurique et un habillage aromatique grand.
Bouche complètement fondue, avec du caractère, un côté traçante et une rondeur
avenante. Grande aromatique. Puissance très élégante, avec un retour sur de
magnifiques amers nobles et une sorte de mâche presque tannique. Finale sur des
notes tertiaires type champignons, puissante, avec une acidité enrobée qui
allonge l’ensemble. Je pars sur un chardonnay de noble origine, plutôt style
Grand Cru mais que je ne place pas (Trop « gras » pour les Chablis et
le Corton Charlemagne, et manque évident de recul sur les Montrachets
!).
Pour les rouges
Dégustés au
Salon des Vins de Loire St Nicolas de Bourgueil,
Eclipse n°11 2014, Frédéric Mabileau :
je pourrais presque reprendre mes notes de la dernière dégustation. Quelle
grande et noble maturité au nez, quelle fruité intense et élégant, presque
bourguignon. Bouche sur un équilibre magistral, fine, élégante et équilibrée.
Pointe glycérinée noble. Finale exceptionnelle, qui voit le retour d’un
équilibre droit, tendu et traçant, typique du grand Cabernet Franc et au Salon Biodyvin
St Nicolas de Bourgueil, Eclipse n°12 2015, domaine Frédéric
Mabileau rassemble toutes les qualités des précédents vins. Grand
nez de pinot noir, aristocratie des jus (encore en devenir), équilibre
magistral en bouche, du gras, de la mâche, des tannins fins, de l’acidité. Quel
top ! Je ne devrais pas le dire, mais un vin à acheter d’urgence (!).
Dégustés au Salon Nebbiolo, Barolo DOCG, Vigna Rionda Riserva X Anni 2006, Massolino :
le Grand Vin ! Synthèse (et symbiose) parfaite entre le pinot fin et la
syrah. Nez élégant, fruité, épicé, floral, … follement complexe, mais toujours
sur un registre de fraîcheur. Grande et belle bouche tannique, aromatique
presque exubérante, avec un grain sublime - Barbaresco
DOCG, Riserva Basarin 2012, Adriano Marco e Vittorio : l’exceptionnel
dans le verre. Un premier nez sur le fruité intense et la puissance maîtrisée,
un second nez sur la menthe poivrée, voilà une belle entrée en matière (ou l’art
de nous faire saliver). En bouche, le vin arrive à concilier puissance et
élégance, sur un registre frais malgré la charge tannique et le degré
alcoolique. Tannins abondants mais doux - Barolo DOCG, Sori Ginestra 2008, Conterno Fantino :
impression générale, et particulièrement au nez, de soie. Bouche jeune encore,
mais énergique. Alliance entre une sphéricité avenante et une tension saline.
Finale tannique qui sait rester fraîche. Immense empreinte sur la longueur et
sur la largeur.
Dégusté
au Grand Tasting,
Maury sec, Alt. 433M 2016, Mas Amiel : ce vin
est issu d’une parcelle située à 433 mètres d’altitude, et assemble le grenache
noir et le Lladoner
Pelut (un cépage que je découvre). Et quelle découverte. Un nez
complètement OVNI (objet vinique non identifié), une grande fraîcheur minérale,
un profil aromatique sur l’infusion de fraises (il faut avoir pas mal d’imagination
pour infuser des fraises), mais sur un substrat sec évanescent, subtil et
éveillant notre curiosité (et nos papilles). Bouche à l’avenant, originale, des
tannins évanescent, dégageant une sorte de zénitude presque cistercienne (mais
avec beaucoup beaucoup de plaisir sans la forme d’une rondeur mesurée).
Dégusté
au Salon Biodyvin,
Sancerre « Belle Dame » 2015, domaine Vacheron
sur l’élégance. Du fruit (pinot !), de la réglisse et ce côté
« fumé » que je perçois souvent dans les Sancerre. Grand vin. RDV
dans quelques années.
Offert par des « amis vignerons »
et bu dans leur cave.
A l’aveugle pour ce vin mystère, sans
étiquette, et dont la couche de moisissure traduit un certain âge … A l’ouverture,
une robe diaphane encore vaillante, d’une belle brillante et tirant vers des
teintes orangées. Le nez est magnifique, sur les champignons de Paris de noble
origine, un peu comme ce plat dégusté en juin dernier à Fontevraud.
Après une relative longue aération (30 minutes), ces notes tertiaires s’estompent
peu à peu au profit de touches tendrement fruitées, plus fruits rouges que
noirs. J’y décèle pèle mêle des fragrances d’alcool de cerise, de kirch, des
épices douces, le tabac blond, une sorte d’infusion de tilleul, … La bouche est
étonnamment alerte et jeune quoique fondue. Feuilles mortes, fruité intense et
acidité bien présente dessinent une complexité magnifiée. Finale tendrement et
subtilement veloutée, presque « sucrée ». Un moment de grâce nous a
parcouru l’espace d’un instant ! A mettre directement au panthéon des
grands bourgognes et au firmament de mes sensations viniques. Merci à Lucien,
le grand-père de Georges Chicotot pour cette belle ouvrage. Il s’agissait d’un Nuits Saint Georges, premier cru 1923, domaine Chicotot,
issu des climats « Rue de Chaux » et « Pruliers ».
Bu en vacances en Bretagne, Vosne Romanée, premier cru les Brulées 2004, domaine René
Engel : robe sur une évolution modérée, encore rubis à peine
teintée de notes tuilées. Nez de pinot sur un équilibre tertiaire, sur un
triplet fruits infusés, végétal noble et feuilles mortes séchées. Bouche tout
en soie, fraîche, un distillat de saveurs florales fines. Le fruit est encore
bien présent, sublimé à la fois par l’acidité toujours ciselée et les
fragrances empyreumatiques. Puissance très maîtrisée, un grain tannique fin.
Finale laissant une empreinte douce, mais d’une persistance ultime.
Bu à « l’Hostellerie
de Levernois » (merci Nicolas - bis) Volnay, premier cru Clos
de la Bousse d’Or 1999, domaine de la Pousse d’Or : on part
sur un grand rouge présentant une robe rubis légèrement évoluée, très brillante
et déjà salivante. Nez avec un côté animal justement dosé, comme il faut pour
garder ses notes de fruits murs, plutôt fruits noirs, complétés par des
fragrances épicées et une tendre évolution. C’est (déjà !) profond et
suave. J’en bave encore à faire le CR. Grande bouche de pinot noir noble, avec
des arômes complexes, fondus, une belle acidité apportant un soyeux et une
suavité exceptionels. C’est tannique mais équilibré, une sorte d’infusion d’épices
douces et de réglisse. Accord proche de l’idéal avec le bœuf
« sauvage ». Je pars sur un côte de Nuits assez évolué, plutôt Vosne
ou Chambolle, sur 2006 par exemple.
Bu au restaurant « 1862 » aux Eyzies de Tayac, Volnay, premier cru Clos des Ducs 2011, domaine du Marquis d’Angerville
: la claque de la soirée. Un trèèèèèès
grand pinot. Corbeille de fruits, notes réglissées (d’amers nobles) et fumées,
impression de zénitude au nez avec un grain superlatif. Belle évolution au bout
de (seulement) 7 ans. En bouche, c’est déjà fondu, mais le vin sait composer
(et se complexifier) sur un registre de fruits rouges et noirs, de tension
acide, d’amers salivants, et surtout un toucher de tannins digne des plus beaux
amortis de Mc Enroe. Accord parfait avec le veau. Magnifique persistance.
Bu au restaurant « Autour d’un Cep » à Angers, Sancerre, les Garennes
2014, Vincent Gaudry : un vin ANTHOLOGIQUE qui s’inscrit d’ores et déjà dans mon
panthéon de 2018. Il y a bien longtemps qu’un pinot ne m’avait pas scotché de
la sorte, et pourtant, j’ai quelques beaux bourgognes en magasin ! Robe
rubis assez claire, brillante, sans trace d’évolution. Grand nez qui pinote
clairement, le fruit est mûr, bien mûr, juste ce qu’il faut. Légèrement
acidulé, une pointe fumée en complément, une profondeur et une grande marque.
Mes réceptacles olfactifs sont déjà en émoi. En bouche, le vin se présente
comme une pièce de soie, ultra-élégant. Equilibre droit, fruité éclatant,
jamais ostentatoire ni caricatural, trame allongée sur une acidité avenante et
gracieuse. Grande et belle empreinte, minéralité en arrière plan qui apporte un
complément de volume aux tannins, notes de pierre à fusil, pointe réglissée qui
définissent un arrière-plan sur une amertume salivante. Comparaison n’est pas
raison a-t-on coutume de dire, mais là, on se croirait sur Chambolle, plutôt
versant premier ou grand cru. En conclusion, si je devais résumer mes
impressions en un seul mot, ce serait : « vin sensuel ». Mon
coéquipier d’un soir me souffle : Un vin comme ça, une
Ukrainienne, et c’est le Nirvana ! Je le laisse seul responsable de
ses propos.
Pour les « jaunes », « doux »
et « liquoreux »
Dégusté au Salon des Vins de Loire, Coteaux du Layon, Sélection de Grains Nobles 2015,
domaine Catherine et Philippe Delesvaux : le (très !)
grand frère du précédent (les Clos), avec partout un supplément de
constitution. Liqueur noble en bouche évoquant un vieux cognac, rondeur
traçante, trame acide en filigrane qui empêche le vin de basculer vers le côté
obscur (les « Layon » pâteux de notre jeunesse). Grandiose finale.
Dégusté au Grand Tasting, Maury doux, 1969, Mas Amiel : je médite, je
médite. Ceux qui me connaissent savent que la méditation est mon fort. Mais là,
on ne peut pas faire autrement. Un nez avec des fragrances à la fois de rancio
et de « Jaune », un fruité qui ressort de l’ensemble. Fraîcheur,
grande aromaticité noble, des fruits confits, des notes de pruneaux, de peau de
noix, … et une persistance … jamais vue. Devant tant d’émotion, même le site
internet du Mas Amiel reste sobre : « La robe est ambrée et
reste profonde malgré les années … Le nez est intense et précis, cacao, tabac
blond et le noble arôme de noix si caractéristique ces très vieux vins doux
naturels. La bouche est ample, fine douce et sensuelle. » (Crédit© :
Mas Amiel qui me pardonnera cet emprunt). Un vin à boire pour lui, avec une
douce musique de fond comme le concerto pour violon de Tchaïkovski.
Dégusté au Salon des Vignerons
Indépendants, Arbois, vin Jaune 2010, Jacques Tissot :
dernière étape, dernière marche, dernière claque ! Un nez d’épices nobles,
une pointe de peau de noix, une élégance superlative, une bouche à la fois
tendue, nerveuse et ronde, enrobé qui dure, qui dure … Tous les ingrédients d’un
grand jaune sont là. Clap de fin car nos papilles ne s’en remettront pas (on
avait bien programmé une série de Maury du Mas Amiel, mais nous avons préféré
renoncer tant l’empreinte était magique.
Bus en vacances en
Bretagne, Côtes du Jura 2012,
domaine Macle :
nez sur un oxydatif élégant, presque « ménagé », noix et curry.
Bouche charnu, douce, dégageant une impression à la fois glycérinée (sèche) et
de « faux-sucré ». Enrobage parfait des papilles, complété par une
belle tension sans mollesse. Grande minéralité qui ressort en finale, sur une
sorte de salinité gourmande (empreinte magique après une nuit d’aération).
Accord parfait avec un Comté de 24 mois : le « jaune » s’intègre
encore plus précisément, laissant une fraîcheur superlative en finale, synthèse
entre des notes oxydatives et un côté mentholé allongeant le vin - Jurançon, Quintessence du Petit Manseng 2006, domaine
Cauhapé : magnifique robe dorée, vieil or. Très grand nez
typique du botrytis, avec une sensation liquoreuse rôtie, une impression
d’acidité qui apporte déjà une vivacité salivante. Fragrances minérales d’une
élégance superlative. Bouche avec une attaque serrée, dégageant une énergie
énorme. Acidité saline « perlante », fraîcheur superlative, avec une
intégration parfaite de l’acidité et de la liqueur. Floralité sur la pêche
poêlée. Finale à la fois effilée et large, avec une puissance domptée et
équilibrée. Rôti superlatif, avec un retour sur la truffe / la morille - DO Montilla-Moriles, Pedro Ximenes, Granda Reserva 1971, Toro
Albala : un nez d’une folle complexité, dans lequel toutes les
fragrances peuvent apparaître. En vrac, le rancio, la figue, le café, le
pruneau, … avec une double impression d’acidité et de fraîcheur ! Liqueur
superlative en bouche, avec une aromatique exceptionnelle de complexité et de
plaisir, le tout étant porté par une grande et belle acidité. Arômes de
pruneaux, de raisins secs et d’amers type « peau de noix » /
« caramel brûlé ». Alliance parfaite de la puissance et de la
finesse. Finale salivante, sur un extrait sec énorme et une acidité
aristocratique.
Bu au restaurant « La
Pomme » aux Damps,
Maury, « 20 ans en l’an 2000 » (millésime 1980),
domaine du Mas Amiel : un OVNI offert par une amie
bourguignonne, rencontrée il y a déjà quelques années dans les vignes du côté
de Volnay. Un énorme cadeau (merci Karen) pour ce vin de type solera, sur une
base grenache noir. Un véritable tawny avec une oxydation ménagée (et
maîtrisée), une aromatique sur la figue et la prune, des notes confites /
compotées, agrémentée de touches de cacao, de bois précieux, de tabac blond et
une sensation de douceur et de rondeur fraîches. Un sucre maîtrisé, presque sur
les zestes d’agrumes confits. Bouche extrêmement complexe, tannins d’un soyeux
superlatif. Finale interminable, avec des arômes de noix, de caramel et d’épices.
Quelle
collection de Grands rouges !
Belle
et douce année 2019 à toutes et à tous. RDV l’année prochaine pour de nouvelles
dégustations.
Bruno
4 commentaires:
Y'a pas à dire, c'est l'année d'une Jaune révolte !
Car voir des oxydatifs dans le meilleur de l'année du Bobosse, c'était pas gagné !
Passe de très belles fêtes,
Oliv
Comme disait un (autre) nain, "J'ai changé"
Mon petit Bruno, il me paraitrait interessant de donner le domaine du Sancerre Belle Dame. Ha la la ces vieilles personnes.
Oubli rectifie mon petit JP
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