23 décembre 2018

Bilan de l'année 2018

En préambule à un bilan vinique de l’année 2018, quelques confirmations lors de ces 52 semaines écoulées : des retrouvailles et des surprises, parfois agréables, d’autres plus désagréables, avec des déceptions marquées. C’est le propre de l’homme. Rien n’est jamais acquis, y compris (surtout) en « amitié ». L’avenir nous apportera sans doute des explications et/ou des confirmations d’impressions laissées par 2018 !
Bilan de cette année 2018 qui avait débuté avec le Salon des Vins de Loire à Angers. Une sélection toute personnelle, difficile à rendre synthétique tant nous avons bu de belles (et exceptionnelles) choses !

Pour les blancs
Dégusté au Grand Tasting, Chablis, Grand Cru Preuses 2003, Cave de la Chablisienne : nez sur une aromatique très originale, marquée par des notes cétoniques plutôt élégantes et une fraîcheur superlative. Volatils élégants j’ai noté sur le coup ! Bouche charnue, grillée, tannique, … qui laisse une impression minérale / acide exacerbée. Quelle énergie (aucune molécule de mollesse pour ce 2003). Persistance ultime.
Bu à table chez notre Pampo national, Chassagne-Montrachet, premier cru les Caillerets 2012, Marc Colin : robe jaune claire, transparente. L’étoffe d’un grand (cru). Elégance ultime sur des fragrances de noisettes fraîches, de notes mentholées, de grillé élégant. Bouche énergique, tellurique, mais sur un substrat très fin, floral, frais, allongé. Vibration sur la durée. Pointe de fine acidité qui allonge l’ensemble. Jeune aujourd’hui, mais quelle promesse.
Bu à « l’Hostellerie de Levernois » (merci Nicolas) Meursault, premier cru les Perrières 2000, domaine Potinet-Ampeau : le vin présente une robe jaune dorée assez évoluée. Premier nez un peu retenu, mais qui va s’ouvrir très rapidement. Minéralité et floralité, belle trame acide, une impression de force tellurique et un habillage aromatique grand. Bouche complètement fondue, avec du caractère, un côté traçante et une rondeur avenante. Grande aromatique. Puissance très élégante, avec un retour sur de magnifiques amers nobles et une sorte de mâche presque tannique. Finale sur des notes tertiaires type champignons, puissante, avec une acidité enrobée qui allonge l’ensemble. Je pars sur un chardonnay de noble origine, plutôt style Grand Cru mais que je ne place pas (Trop « gras » pour les Chablis et le Corton Charlemagne, et manque évident de recul sur les Montrachets !).

Pour les rouges
Dégustés au Salon des Vins de Loire St Nicolas de Bourgueil, Eclipse n°11 2014, Frédéric Mabileau : je pourrais presque reprendre mes notes de la dernière dégustation. Quelle grande et noble maturité au nez, quelle fruité intense et élégant, presque bourguignon. Bouche sur un équilibre magistral, fine, élégante et équilibrée. Pointe glycérinée noble. Finale exceptionnelle, qui voit le retour d’un équilibre droit, tendu et traçant, typique du grand Cabernet Franc et au Salon Biodyvin St Nicolas de Bourgueil, Eclipse n°12 2015, domaine Frédéric Mabileau rassemble toutes les qualités des précédents vins. Grand nez de pinot noir, aristocratie des jus (encore en devenir), équilibre magistral en bouche, du gras, de la mâche, des tannins fins, de l’acidité. Quel top ! Je ne devrais pas le dire, mais un vin à acheter d’urgence (!).
Dégustés au Salon Nebbiolo, Barolo DOCG, Vigna Rionda Riserva X Anni 2006, Massolino : le Grand Vin ! Synthèse (et symbiose) parfaite entre le pinot fin et la syrah. Nez élégant, fruité, épicé, floral, … follement complexe, mais toujours sur un registre de fraîcheur. Grande et belle bouche tannique, aromatique presque exubérante, avec un grain sublime - Barbaresco DOCG, Riserva Basarin 2012, Adriano Marco e Vittorio : l’exceptionnel dans le verre. Un premier nez sur le fruité intense et la puissance maîtrisée, un second nez sur la menthe poivrée, voilà une belle entrée en matière (ou l’art de nous faire saliver). En bouche, le vin arrive à concilier puissance et élégance, sur un registre frais malgré la charge tannique et le degré alcoolique. Tannins abondants mais doux - Barolo DOCG, Sori Ginestra 2008, Conterno Fantino : impression générale, et particulièrement au nez, de soie. Bouche jeune encore, mais énergique. Alliance entre une sphéricité avenante et une tension saline. Finale tannique qui sait rester fraîche. Immense empreinte sur la longueur et sur la largeur.
Dégusté au Grand Tasting, Maury sec, Alt. 433M 2016, Mas Amiel : ce vin est issu d’une parcelle située à 433 mètres d’altitude, et assemble le grenache noir et le Lladoner Pelut (un cépage que je découvre). Et quelle découverte. Un nez complètement OVNI (objet vinique non identifié), une grande fraîcheur minérale, un profil aromatique sur l’infusion de fraises (il faut avoir pas mal d’imagination pour infuser des fraises), mais sur un substrat sec évanescent, subtil et éveillant notre curiosité (et nos papilles). Bouche à l’avenant, originale, des tannins évanescent, dégageant une sorte de zénitude presque cistercienne (mais avec beaucoup beaucoup de plaisir sans la forme d’une rondeur mesurée).
Dégusté au Salon Biodyvin, Sancerre « Belle Dame » 2015, domaine Vacheron sur l’élégance. Du fruit (pinot !), de la réglisse et ce côté « fumé » que je perçois souvent dans les Sancerre. Grand vin. RDV dans quelques années.
Offert par des « amis vignerons » et bu dans leur cave. A l’aveugle pour ce vin mystère, sans étiquette, et dont la couche de moisissure traduit un certain âge … A l’ouverture, une robe diaphane encore vaillante, d’une belle brillante et tirant vers des teintes orangées. Le nez est magnifique, sur les champignons de Paris de noble origine, un peu comme ce plat dégusté en juin dernier à Fontevraud. Après une relative longue aération (30 minutes), ces notes tertiaires s’estompent peu à peu au profit de touches tendrement fruitées, plus fruits rouges que noirs. J’y décèle pèle mêle des fragrances d’alcool de cerise, de kirch, des épices douces, le tabac blond, une sorte d’infusion de tilleul, … La bouche est étonnamment alerte et jeune quoique fondue. Feuilles mortes, fruité intense et acidité bien présente dessinent une complexité magnifiée. Finale tendrement et subtilement veloutée, presque « sucrée ». Un moment de grâce nous a parcouru l’espace d’un instant ! A mettre directement au panthéon des grands bourgognes et au firmament de mes sensations viniques. Merci à Lucien, le grand-père de Georges Chicotot pour cette belle ouvrage. Il s’agissait d’un Nuits Saint Georges, premier cru 1923, domaine Chicotot, issu des climats « Rue de Chaux » et « Pruliers ».
Bu en vacances en Bretagne, Vosne Romanée, premier cru les Brulées 2004, domaine René Engel : robe sur une évolution modérée, encore rubis à peine teintée de notes tuilées. Nez de pinot sur un équilibre tertiaire, sur un triplet fruits infusés, végétal noble et feuilles mortes séchées. Bouche tout en soie, fraîche, un distillat de saveurs florales fines. Le fruit est encore bien présent, sublimé à la fois par l’acidité toujours ciselée et les fragrances empyreumatiques. Puissance très maîtrisée, un grain tannique fin. Finale laissant une empreinte douce, mais d’une persistance ultime.
Bu à « l’Hostellerie de Levernois » (merci Nicolas - bis) Volnay, premier cru Clos de la Bousse d’Or 1999, domaine de la Pousse d’Or : on part sur un grand rouge présentant une robe rubis légèrement évoluée, très brillante et déjà salivante. Nez avec un côté animal justement dosé, comme il faut pour garder ses notes de fruits murs, plutôt fruits noirs, complétés par des fragrances épicées et une tendre évolution. C’est (déjà !) profond et suave. J’en bave encore à faire le CR. Grande bouche de pinot noir noble, avec des arômes complexes, fondus, une belle acidité apportant un soyeux et une suavité exceptionels. C’est tannique mais équilibré, une sorte d’infusion d’épices douces et de réglisse. Accord proche de l’idéal avec le bœuf « sauvage ». Je pars sur un côte de Nuits assez évolué, plutôt Vosne ou Chambolle, sur 2006 par exemple.
Bu au restaurant « 1862 » aux Eyzies de Tayac, Volnay, premier cru Clos des Ducs 2011, domaine du Marquis d’Angerville : la claque de la soirée. Un trèèèèèès grand pinot. Corbeille de fruits, notes réglissées (d’amers nobles) et fumées, impression de zénitude au nez avec un grain superlatif. Belle évolution au bout de (seulement) 7 ans. En bouche, c’est déjà fondu, mais le vin sait composer (et se complexifier) sur un registre de fruits rouges et noirs, de tension acide, d’amers salivants, et surtout un toucher de tannins digne des plus beaux amortis de Mc Enroe. Accord parfait avec le veau. Magnifique persistance.
Bu au restaurant « Autour d’un Cep » à Angers, Sancerre, les Garennes 2014, Vincent Gaudry : un vin ANTHOLOGIQUE qui s’inscrit d’ores et déjà dans mon panthéon de 2018. Il y a bien longtemps qu’un pinot ne m’avait pas scotché de la sorte, et pourtant, j’ai quelques beaux bourgognes en magasin ! Robe rubis assez claire, brillante, sans trace d’évolution. Grand nez qui pinote clairement, le fruit est mûr, bien mûr, juste ce qu’il faut. Légèrement acidulé, une pointe fumée en complément, une profondeur et une grande marque. Mes réceptacles olfactifs sont déjà en émoi. En bouche, le vin se présente comme une pièce de soie, ultra-élégant. Equilibre droit, fruité éclatant, jamais ostentatoire ni caricatural, trame allongée sur une acidité avenante et gracieuse. Grande et belle empreinte, minéralité en arrière plan qui apporte un complément de volume aux tannins, notes de pierre à fusil, pointe réglissée qui définissent un arrière-plan sur une amertume salivante. Comparaison n’est pas raison a-t-on coutume de dire, mais là, on se croirait sur Chambolle, plutôt versant premier ou grand cru. En conclusion, si je devais résumer mes impressions en un seul mot, ce serait : « vin sensuel ». Mon coéquipier d’un soir me souffle : Un vin comme ça, une Ukrainienne, et c’est le Nirvana ! Je le laisse seul responsable de ses propos. 

Pour les « jaunes », « doux » et « liquoreux »
Dégusté au Salon des Vins de Loire, Coteaux du Layon, Sélection de Grains Nobles 2015, domaine Catherine et Philippe Delesvaux : le (très !) grand frère du précédent (les Clos), avec partout un supplément de constitution. Liqueur noble en bouche évoquant un vieux cognac, rondeur traçante, trame acide en filigrane qui empêche le vin de basculer vers le côté obscur (les « Layon » pâteux de notre jeunesse). Grandiose finale.
Dégusté au Grand Tasting, Maury doux, 1969, Mas Amiel : je médite, je médite. Ceux qui me connaissent savent que la méditation est mon fort. Mais là, on ne peut pas faire autrement. Un nez avec des fragrances à la fois de rancio et de « Jaune », un fruité qui ressort de l’ensemble. Fraîcheur, grande aromaticité noble, des fruits confits, des notes de pruneaux, de peau de noix, … et une persistance … jamais vue. Devant tant d’émotion, même le site internet du Mas Amiel reste sobre : « La robe est ambrée et reste profonde malgré les années … Le nez est intense et précis, cacao, tabac blond et le noble arôme de noix si caractéristique ces très vieux vins doux naturels. La bouche est ample, fine douce et sensuelle. » (Crédit© : Mas Amiel qui me pardonnera cet emprunt). Un vin à boire pour lui, avec une douce musique de fond comme le concerto pour violon de Tchaïkovski.
Dégusté au Salon des Vignerons Indépendants, Arbois, vin Jaune 2010, Jacques Tissot : dernière étape, dernière marche, dernière claque ! Un nez d’épices nobles, une pointe de peau de noix, une élégance superlative, une bouche à la fois tendue, nerveuse et ronde, enrobé qui dure, qui dure … Tous les ingrédients d’un grand jaune sont là. Clap de fin car nos papilles ne s’en remettront pas (on avait bien programmé une série de Maury du Mas Amiel, mais nous avons préféré renoncer tant l’empreinte était magique.
Bus en vacances en Bretagne, Côtes du Jura 2012, domaine Macle : nez sur un oxydatif élégant, presque « ménagé », noix et curry. Bouche charnu, douce, dégageant une impression à la fois glycérinée (sèche) et de « faux-sucré ». Enrobage parfait des papilles, complété par une belle tension sans mollesse. Grande minéralité qui ressort en finale, sur une sorte de salinité gourmande (empreinte magique après une nuit d’aération). Accord parfait avec un Comté de 24 mois : le « jaune » s’intègre encore plus précisément, laissant une fraîcheur superlative en finale, synthèse entre des notes oxydatives et un côté mentholé allongeant le vin - Jurançon, Quintessence du Petit Manseng 2006, domaine Cauhapé : magnifique robe dorée, vieil or. Très grand nez typique du botrytis, avec une sensation liquoreuse rôtie, une impression  d’acidité qui apporte déjà une vivacité salivante. Fragrances minérales d’une élégance superlative. Bouche avec une attaque serrée, dégageant une énergie énorme. Acidité saline « perlante », fraîcheur superlative, avec une intégration parfaite de l’acidité et de la liqueur. Floralité sur la pêche poêlée. Finale à la fois effilée et large, avec une puissance domptée et équilibrée. Rôti superlatif, avec un retour sur la truffe / la morille - DO Montilla-Moriles, Pedro Ximenes, Granda Reserva 1971, Toro Albala : un nez d’une folle complexité, dans lequel toutes les fragrances peuvent apparaître. En vrac, le rancio, la figue, le café, le pruneau, … avec une double impression d’acidité et de fraîcheur ! Liqueur superlative en bouche, avec une aromatique exceptionnelle de complexité et de plaisir, le tout étant porté par une grande et belle acidité. Arômes de pruneaux, de raisins secs et d’amers type « peau de noix » / « caramel brûlé ». Alliance parfaite de la puissance et de la finesse. Finale salivante, sur un extrait sec énorme et une acidité aristocratique.
Bu au restaurant « La Pomme » aux Damps, Maury, « 20 ans en l’an 2000 » (millésime 1980), domaine du Mas Amiel : un OVNI offert par une amie bourguignonne, rencontrée il y a déjà quelques années dans les vignes du côté de Volnay. Un énorme cadeau (merci Karen) pour ce vin de type solera, sur une base grenache noir. Un véritable tawny avec une oxydation ménagée (et maîtrisée), une aromatique sur la figue et la prune, des notes confites / compotées, agrémentée de touches de cacao, de bois précieux, de tabac blond et une sensation de douceur et de rondeur fraîches. Un sucre maîtrisé, presque sur les zestes d’agrumes confits. Bouche extrêmement complexe, tannins d’un soyeux superlatif. Finale interminable, avec des arômes de noix, de caramel et d’épices.

Quelle collection de Grands rouges !

Belle et douce année 2019 à toutes et à tous. RDV l’année prochaine pour de nouvelles dégustations.

Bruno

4 commentaires:

Oliv a dit…

Y'a pas à dire, c'est l'année d'une Jaune révolte !
Car voir des oxydatifs dans le meilleur de l'année du Bobosse, c'était pas gagné !

Passe de très belles fêtes,
Oliv

Bruno Bosselin a dit…

Comme disait un (autre) nain, "J'ai changé"

Babe a dit…

Mon petit Bruno, il me paraitrait interessant de donner le domaine du Sancerre Belle Dame. Ha la la ces vieilles personnes.

Bruno Bosselin a dit…

Oubli rectifie mon petit JP