Le
restaurant triplement étoilé de Régis et Jacques Marcon représente, à nos yeux,
le summum de la gastronomie française. J’en veux pour preuve les trois précédentes
visites qui resteront à jamais gravées dans nos mémoires (pour nos
50 ans, pour les 60
ans de l’ami JP et juste pour le fun, entre
amis il y a déjà trop longtemps).
En
vacances dans le Pilat, la tentation était grande de retourner chez l’un des
plus grands chefs de France. Par chance, les maisons Marcon viennent d’ouvrir un
nouvel établissement dans le village de St Bonnet le Froid, l’Hôtel « La
Découverte » qui permet de bénéficier, à prix modique, de tous les
services de la grande maison, y compris le voiturier (très utile vers 1h00 du
matin après quelque digestif …). Ni une ni deux, réservation de 3 chambres pour
une optimisation d’un dîner à 6, entre amis.
Comme
toujours (ou presque), nous partons sur le menu dégustation « Balade en
forêt entre Velay et Vivarais ».
Amuse-bouche
divers et variés
Cistre et gaillet
Premières tomates du jardin
au parfum de cistre
moules du Mont St Michel en galette croustillante
Reine des prés
Langoustine croustillante et
petite épeautre,
son bouillon infusé à la reine des prés
Ragout de lentilles
Œuf parfait, truffes, sauce Périgueux, …
(pour l’allergique que je suis …)
Sarriette des montagnes
Ragout de légumes du jardin
servi sur des gnocchis carotte et olives vertes
Verveine
Le filet d’omble chevalier poêlé,
premiers haricots
chutney de Reine Claude aux girolles
Tanaisie
En infusion de tanaisie, le
consommé de champignon, rissole croustillante
Serpolet
Couci-couça d’agneau au serpolet,
purée d’aubergine légèrement fumée
Les fromages d’Ardèche et d’Auvergne
affinés par nos soins
ou
Composition à base de fromages de la région
Pour patienter, un avant-dessert ...
Les desserts
Pavlova de géranium odorant,
myrtilles sauvages
Feuillets croustillants sarrasin nappés d’un caramel de
morilles,
tartare et compotée de mirabelles
Une dégustation d’un chocolat « Mahoé »,
à la Tanaisie quinoa grillé
Feuille à feuille de framboises Mecker,
à la fleur de cistre
Pour finir, mignardises diverses et variées : nougat au cèpe, mignardise fraîche, caviar de lentilles, sucette glacée, pâte de fruits verveine (une tuerie), tuile lentille du Puy, mikado à la rose, chococèpe avec notre café, ...
Que
dire de l’assiette (des assiettes) ? La perfection si tant est qu’elle
existe. Nous avons noté un renouvellement du style, plus discrètement marqué
champignon, mais d’une qualité toujours au top. Tous les plats sont, depuis une
« simple » déclinaison de tomates fraîches et vivifiantes jusqu’aux
deux sommets de cette dégustation (l’omble chevalier et l’agneau). Grandissime
plat de « remplacement » avec ce ragoût de lentilles. Et toujours
cette humilité, tant de la part de Régis le papa, qui nous avons vu à deux
occasions lors de ce repas, que de Jacques le fils, qui prend peu à peu la
relève de son père. Plus qu’un repas, c’est une méditation philosophique à
laquelle nous avons été conviés, en parfait accord avec la conclusion du petit
mot de bienvenu : « La cuisine ne peut qu’être belle quand elle nous
rapproche de la nature ».
Côté
vins, nous avons bu oui, et (beaucoup) plus qu’un verre (mais le voiturier nous
a permis de rentrer tranquillement et en toute sécurité - tard dans la nuit - dans
nos pénates. Qu’il en soit chaleureusement remercié) !
A l’apéritif, un Condrieu, Chéry 2014,
André Perret : un nez floral tendre, plutôt fumé,
sur une belle aromatique fine, à l’opposé complet des viognier opulent. Très
belle promesse. Superbe bouche construite sur une acidité / minéralité saline,
qui laisse échapper toutefois des notes opulentes et grasses, mais parfaitement
équilibrées et dosées. Notes de violettes, un peu capiteuses mais sachant
rester fraîches, et équilibrées. Belle amertume finale vivifiante, qui donne
une impression (réelle) de digestibilité. Très belle découverte pour ma part. Excellent (+)
Avec
les deux premiers plats, un Saint Aubin, premier cru les Murgers des Dents de Chien
2015, domaine Ramonet : très grand nez de chardonnay sur une
réduction noble. Notes grillées, amandes fumées et végétal salivant. Bouche à l’avenant,
construite sur la puissance du cépage. C’est puissant certes, mais frais, salin
et salivant. Longue empreinte sur les papilles (j’en salive rien qu’à écrire ce
compte-rendu !). Retour sur un fin minéral frais, légèrement granuleux. Quel
toucher de bouche. On tutoie presque les sommets. Excellent +
Avec
les deux plats suivants, avant l’agneau, un Saumur Brézé 2010, domaine Guiberteau : nez
assez évolué qui, dès les premières fragrances, brèze nettement. Peut-être un
léger oxydatif mais qui ne me gène pas. En bouche, on est sur un Anjou minéral,
évolué, avec des notes miellées qui atténuent la pointe oxydative, une sorte d’évolution
maîtrisée. Bouche droite, typique du chenin. Belle aromatique fraîche, sur un
gras sans opulence. Notes mentholées et de fumées, dégageant une belle
fraîcheur et une impression de « perlant ». Excellent ++
Avec
la viande, un DOC
Douro, Vinho Tinto Pó de Poeira 2014 :
un nez de cabernet sauvignon bien mur, sur les fruits noirs et une aromatique
plus développée. Rondeur et profondeur se dégagent. Bouche construite sur une
structure sérieuse, corpulente mais tenue et tendue par une acidité
parfaitement dosée. Charge tannique impressionnante, avec une sensation de petits
grains frais et salivants. Finale fine, sur des épices douces. Excellent
Avec
les fromages, un
Meursault, les Luchets 2014, Jean-Marc Roulot : nez fin et d’une
élégance folle, pointe grillée, gras équilibré et amers salivants. Bouche à l’avenant,
portée par une acidité ciselée au millimètre. J’ai malgré tout un peu l’impression
d’être passé à côté de ce vin, pour des raisons qui seront exposées ci-après. Non
noté
Pour
une fois, vous n’aurez pas droit à des photos des bouteilles. Et c’est là que
le bât blesse. En effet, si tout est pratiquement parfait, de l’accueil jusqu’au
retour à l’hôtel, petit gros bémol avec le service de sommellerie !
Quelques exemples :
- J’ai pour habitude de demander les bouteilles pour les photographier. Il est quand même inconcevable d’être obligé de le (re)demander systématiquement pour les 5 bouteilles (quant à leur présentation forcée dans le dos, nous obligeant à des contorsions, et dans le noir … cela n’aide pas à des clichés de qualité),
- Deuxième service du vin rouge : 6 personnes à table, 5 personnes servies (la sixième personne ? oubliée ?). Quant aux tentatives pour discuter des vins portugais, l’essai a été mis en touche très rapidement,
- Service du Meursault : fond de bouteille servi à la hussarde, avec tout le dépôt qui va bien dans le verre,
- Et je passerai sous silence le « non savoir être » du sommelier qui avait vraiment l’air de s’ennuyer … Je vais être direct, sans détour et peut-être un peu cru, mais quand on s’emmerde dans son métier, on en change (et surtout on ne le reporte pas sur les clients).
La
cuisine de Régis et Jacques Marcon mérite tellement mieux !
Il fallait que cela soit dit, mais
revenons sur tous les points positifs de la soirée : un moment entre amis
très réussi, un repas d’anthologie, les échanges avec Régis et Jacques Marcon
qui ont su renouveler leur cuisine en conservant les principes de base (le
champignon sous toutes ses formes).
Rendez-vous
est d’ores et déjà fixé dans un avenir pas trop lointain.
Bruno
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire