13 août 2020

Dîner d'anthologie chez Régis et Jacques Marcon à St Bonnet le Froid (43)


Le restaurant triplement étoilé de Régis et Jacques Marcon représente, à nos yeux, le summum de la gastronomie française. J’en veux pour preuve les trois précédentes visites qui resteront à jamais gravées dans nos mémoires (pour nos 50 ans, pour les 60 ans de l’ami JP et juste pour le fun, entre amis il y a déjà trop longtemps).
En vacances dans le Pilat, la tentation était grande de retourner chez l’un des plus grands chefs de France. Par chance, les maisons Marcon viennent d’ouvrir un nouvel établissement dans le village de St Bonnet le Froid, l’Hôtel « La Découverte » qui permet de bénéficier, à prix modique, de tous les services de la grande maison, y compris le voiturier (très utile vers 1h00 du matin après quelque digestif …). Ni une ni deux, réservation de 3 chambres pour une optimisation d’un dîner à 6, entre amis.

Comme toujours (ou presque), nous partons sur le menu dégustation « Balade en forêt entre Velay et Vivarais ».

Amuse-bouche divers et variés

Cistre et gaillet
Premières tomates du jardin au parfum de cistre
moules du Mont St Michel en galette croustillante

Reine des prés
Langoustine croustillante et petite épeautre,
son bouillon infusé à la reine des prés

Ragout de lentilles
Œuf parfait, truffes, sauce Périgueux, …
(pour l’allergique que je suis …)

Sarriette des montagnes
Ragout de légumes du jardin
servi sur des gnocchis carotte et olives vertes

Verveine
Le filet d’omble chevalier poêlé, premiers haricots
chutney de Reine Claude aux girolles

Tanaisie
En infusion de tanaisie, le consommé de champignon, rissole croustillante

Serpolet
Couci-couça d’agneau au serpolet,
purée d’aubergine légèrement fumée

Les fromages d’Ardèche et d’Auvergne affinés par nos soins

ou

Composition à base de fromages de la région

Pour patienter, un avant-dessert ...

Les desserts

Pavlova de géranium odorant,
myrtilles sauvages

Feuillets croustillants sarrasin nappés d’un caramel de morilles,
tartare et compotée de mirabelles

Une dégustation d’un chocolat « Mahoé »,
à la Tanaisie quinoa grillé

Feuille à feuille de framboises Mecker,
à la fleur de cistre

Pour finir, mignardises diverses et variées : nougat au cèpe, mignardise fraîche, caviar de lentilles, sucette glacée, pâte de fruits verveine (une tuerie), tuile lentille du Puy, mikado à la rose, chococèpe avec notre café, ...

Que dire de l’assiette (des assiettes) ? La perfection si tant est qu’elle existe. Nous avons noté un renouvellement du style, plus discrètement marqué champignon, mais d’une qualité toujours au top. Tous les plats sont, depuis une « simple » déclinaison de tomates fraîches et vivifiantes jusqu’aux deux sommets de cette dégustation (l’omble chevalier et l’agneau). Grandissime plat de « remplacement » avec ce ragoût de lentilles. Et toujours cette humilité, tant de la part de Régis le papa, qui nous avons vu à deux occasions lors de ce repas, que de Jacques le fils, qui prend peu à peu la relève de son père. Plus qu’un repas, c’est une méditation philosophique à laquelle nous avons été conviés, en parfait accord avec la conclusion du petit mot de bienvenu : « La cuisine ne peut qu’être belle quand elle nous rapproche de la nature ».

Côté vins, nous avons bu oui, et (beaucoup) plus qu’un verre (mais le voiturier nous a permis de rentrer tranquillement et en toute sécurité - tard dans la nuit - dans nos pénates. Qu’il en soit chaleureusement remercié) !

A l’apéritif, un Condrieu, Chéry 2014, André Perret : un nez floral tendre, plutôt fumé, sur une belle aromatique fine, à l’opposé complet des viognier opulent. Très belle promesse. Superbe bouche construite sur une acidité / minéralité saline, qui laisse échapper toutefois des notes opulentes et grasses, mais parfaitement équilibrées et dosées. Notes de violettes, un peu capiteuses mais sachant rester fraîches, et équilibrées. Belle amertume finale vivifiante, qui donne une impression (réelle) de digestibilité. Très belle découverte pour ma part. Excellent (+)
Avec les deux premiers plats, un Saint Aubin, premier cru les Murgers des Dents de Chien 2015, domaine Ramonet : très grand nez de chardonnay sur une réduction noble. Notes grillées, amandes fumées et végétal salivant. Bouche à l’avenant, construite sur la puissance du cépage. C’est puissant certes, mais frais, salin et salivant. Longue empreinte sur les papilles (j’en salive rien qu’à écrire ce compte-rendu !). Retour sur un fin minéral frais, légèrement granuleux. Quel toucher de bouche. On tutoie presque les sommets. Excellent +
Avec les deux plats suivants, avant l’agneau, un Saumur Brézé 2010, domaine Guiberteau : nez assez évolué qui, dès les premières fragrances, brèze nettement. Peut-être un léger oxydatif mais qui ne me gène pas. En bouche, on est sur un Anjou minéral, évolué, avec des notes miellées qui atténuent la pointe oxydative, une sorte d’évolution maîtrisée. Bouche droite, typique du chenin. Belle aromatique fraîche, sur un gras sans opulence. Notes mentholées et de fumées, dégageant une belle fraîcheur et une impression de « perlant ». Excellent ++
Avec la viande, un DOC Douro, Vinho Tinto Pó de Poeira 2014 : un nez de cabernet sauvignon bien mur, sur les fruits noirs et une aromatique plus développée. Rondeur et profondeur se dégagent. Bouche construite sur une structure sérieuse, corpulente mais tenue et tendue par une acidité parfaitement dosée. Charge tannique impressionnante, avec une sensation de petits grains frais et salivants. Finale fine, sur des épices douces. Excellent
Avec les fromages, un Meursault, les Luchets 2014, Jean-Marc Roulot : nez fin et d’une élégance folle, pointe grillée, gras équilibré et amers salivants. Bouche à l’avenant, portée par une acidité ciselée au millimètre. J’ai malgré tout un peu l’impression d’être passé à côté de ce vin, pour des raisons qui seront exposées ci-après. Non noté

Pour une fois, vous n’aurez pas droit à des photos des bouteilles. Et c’est là que le bât blesse. En effet, si tout est pratiquement parfait, de l’accueil jusqu’au retour à l’hôtel, petit gros bémol avec le service de sommellerie ! Quelques exemples :

  • J’ai pour habitude de demander les bouteilles pour les photographier. Il est quand même inconcevable d’être obligé de le (re)demander systématiquement pour les 5 bouteilles (quant à leur présentation forcée dans le dos, nous obligeant à des contorsions, et dans le noir … cela n’aide pas à des clichés de qualité),
  • Deuxième service du vin rouge : 6 personnes à table, 5 personnes servies (la sixième personne ? oubliée ?). Quant aux tentatives pour discuter des vins portugais, l’essai a été mis en touche très rapidement,
  • Service du Meursault : fond de bouteille servi à la hussarde, avec tout le dépôt qui va bien dans le verre,
  • Et je passerai sous silence le « non savoir être » du sommelier qui avait vraiment l’air de s’ennuyer … Je vais être direct, sans détour et peut-être un peu cru, mais quand on s’emmerde dans son métier, on en change (et surtout on ne le reporte pas sur les clients).
La cuisine de Régis et Jacques Marcon mérite tellement mieux !

Il fallait que cela soit dit, mais revenons sur tous les points positifs de la soirée : un moment entre amis très réussi, un repas d’anthologie, les échanges avec Régis et Jacques Marcon qui ont su renouveler leur cuisine en conservant les principes de base (le champignon sous toutes ses formes).

Rendez-vous est d’ores et déjà fixé dans un avenir pas trop lointain.

Bruno

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