Crédit photographique © : domaine Arnaud Lambert
LE DOMAINE : HISTORIQUE
Le « Domaine de St-Just » a été créé ex nihilo par Yves Lambert
en 1996 sur la commune de Saint-Just sur Dive, à partir de quelques vignes
familiales rapidement complétées par des plantations et des achats entre 1996
et 2005. Dès le début, la philosophie était de privilégier la vie des sols, de renforcer
ses défenses et de respecter la faune. Cette culture raisonnée s’est
transformée, en 2009, en une véritable démarche biologique, pour aboutir à
l’obtention du label AB en 2012. Aujourd’hui, l’ensemble du domaine est géré suivant les principes de la biodynamie.
En 2009, le
Comte de Colbert, propriétaire du château de Brézé, sollicite Yves et son fils Arnaud
pour reprendre et dynamiser l’exploitation de son vignoble. Cette opportunité
sera un nouveau départ, à la fois
pour renforcer la démarche bio et
respecter la formidable mosaïque que constituent les différents terroirs de
Brézé (ne dit-on pas des grands chenins qu’ils « brèzent » !).
C’est ainsi que la gamme s’est alors élargie de nouvelles cuvées parcellaires.
Je profite de l’occasion pour saluer ici la mémoire d’Yves Lambert, décédé
trop prématurément en 2011. Son fils Arnaud perpétue avec brio l’œuvre
commencée par son père. Une sorte d’hommage et de respect familial.
GEOLOGIE
Les terroirs de Saint Cyr en Bourg et de Brézé sont inscrits au cœur de l’Anjou blanc, sur un substratum calcaire du Turonien (Crétacé supérieur) recouvrant des formations cénomaniennes visibles uniquement en bas de pente, vers le canal de la Dive.
Ce calcaire présente plusieurs formes suivant le sous-étages géologique auquel il appartient : calcaire marin blanc ou crème du Turonien inférieur, Craie blanche micacée du Turonien moyen, Craie jaune / calcaire lacustre du Turonien supérieur. Le calcaire silicifié éocène de Champigny (Bartonien supérieur) n’est pas présent sur ces deux communes.
Les formations tertiaires et quaternaires présentent une puissance relativement faible, définissant des sols peu profonds (70 cm au maximum), favorisant le contact de la vigne avec le substrat calcaire. ces placages dont la composition pédologique est très variée (sables, sables argileux ou limoneux, limons, argiles sablonneuses, argiles, ...) apportent toute une palette de nuances aromatiques aux différentes cuvées, nuances que nous retrouveront lors de la dégustation.
LA GAMME ET LES CUVEES
Historiquement, le domaine de Saint Just déclinait sa production en deux collections « Plaisirs » et « Haute-Couture », la première étant destinée à produire des vins sur la gourmandise du fruit, la seconde mettant en avant la complexité aromatique des terroirs et des cépages.
La gamme issue du château de Brézé, baptisée « Châteaux », est constituée de cuvées parcellaires favorisant l’expression et la typologique de chaque terroir (Clos du Midi, Clos David et Clos de la Rue pour les
blancs ; Clos Mazurique, Clos Tue-Loup et Clos de l’Etoile pour les rouges).
Une collection « Perles », dont les raisins
sont issus de parcelles situées sur les communes de Saint Cyr en Bourg et de
Brézé, complète la gamme, sur la base des trois cépages ligériens classiques
(Chenin, Cabernet Franc et Cabernet Sauvignon) parfois associés au Chardonnay.
A noter qu’il existe également quelques sucres avec deux cuvées en appellation Coteaux de Saumur : l’Or de Brézé et la Valboisière, cuvées produites uniquement dans les années favorables.
Depuis 2017, les vins issus des deux origines, Saint Just sur la commune de St Cyr en Bourg, et Brézé sur la commune éponyme, sont réunis sous la bannière « Domaine Arnaud Lambert » qui compte
maintenant plus de 40 hectares.
Prochainement, le domaine s’étendra sur la commune de Montsoreau, à l’extrémité Est de l’appellation Saumur Champigny, une occasion de découvrir de nouvelles facettes des terroirs de cette région.
Les cuvées
- Crémant de Loire : Crémant de Loire et « 1948 » (blanc et rosé)
- Saumur Blanc : Les Perrières et Coulée de St Cyr - Clos du Midi, Clos David et Clos de la Rue - Brézé (Les Bourguenne)
- Saumur Rouge : Clos Mazurique, Clos Tue-Loup et Clos de l’Etoile
- Saumur Champigny : Yves Lambert, Terres Rouges, Montée des Roches et Clos Moleton
- Coteaux de Saumur : La Valboisière - L’Or de Brézé
LA VISITE DES VIGNES
Petite visite dans les vignes pour débuter
cette journée, visite très instructive puisqu’elle permet de mettre un
« visage » sur les vins qui seront dégustés par la suite.
Première vue de la Coulée de St Cyr, avec
un sol compact mais aéré, sur une assise argileuse, dans laquelle les blancs de
chenin trouvent leur équilibre, leur tension et une certaine aromaticité.
Seconde vue de la Montée des Roches, très
proche géographiquement, mais avec un sol plus aéré, regardant plus vers l’Est
et favorisant une maturité optimale des tannins sans les inconvénients liés au
réchauffement climatique (les raisins conservent une sorte de fraîcheur,
fraîcheur qui se retrouve dans le vin).
LA DEGUSTATION
Du terrain au verre, voilà le dernier
exercice qui nous est réservé. En route pour une symphonie des fragrances et
des saveurs.
Première étape avec la dégustation des vins
en bouteilles.
Saumur, Clos du Midi 2018 :
floralité exotique au nez. Bouche presque immédiate, d’une gourmandise extrême.
Fond structuré et vineux, sur une assise minérale. Belle tension acide qui
apporte une vivacité avenante. UN ivn de copains. Très Bien
Saumur, Clos David 2016
(terroir de sables) : un nez très sérieux et vineux, avec une pointe fumée
qui dégage de la sève. Quel gras venant compléxifier quelques notes perlantes.
Bouche sur la corpulence, serrée, vibrante, avec une impression de force
tellurique. Excellent
Saumur, Clos Davis 2017 :
première claque ! une synthèse (presque) parfaite entre la floralité et
une vinosité minérale au nez. Grand équilibre en bouche, avec un élevage encore
perceptible, mais qui vient juste accompagner le vin. Energie, élégance et
corpulence en bouche. De la tension, du volume, avec une impression de mâche
(presque « tannique »). Finale étonnamment fraîche, sur des notes
mentholées. UN VIN **
Saumur, Clos de la Rue 2015
(terroir de sables et argiles) : nez aujourd’hui encore un peu marqué par
l’élevage … sur un substrat acide bien défini. Des fragrances sur l’opulence,
sans aucune mollesse. Grand vin en devenir sans nul doute. Un joli habillage de
gras sur la trame acide, une aromatique qui ne demande qu’à exploser. RDV dans
10 ans minimum. Excellent aujourd’hui
Saumur, les Perrières 2018 :
nez floral et fruité, sur des notes de pamplemousse bien mûres. Vivacité, gras
et minéralité, l’ensemble laissant une impression serrée sur la langue.
Quelques notes citriques sur une finale vibrante et vive. Une autre lecture de
la convivialité du vin. Très Bien
Saumur, Coulée de St Cyr 2015
(terroir d’argiles) : un air de famille avec les Perrières, mais quel
grand frère ! La deuxième claque ! Une alliance / une synergie entre
gras et tension. Grande bouche bien structurée, avec un élevage qui accompagne
le vin. Une sorte d’opulence sans ses défauts (mollesse, manque de profondeur).
Le temps fera son œuvre. UN VIN **
Saumur, Clos Mazurique 2018 :
du fruit, de la cerise, de l’exubérance de la jeunesse. Bouche malgré tout
structurée, avec une finesse des tannins et une finale sur une pointe
glycérinée et fumée du plus bel effet. Une entrée de gamme, mais quel cadeau. Excellent
Saumur Champigny, les Terres Rouges 2018 : un vin qui possède un supplément de profondeur
et de structure. Si les tannins sont à ce stade encore anguleux, une pointe
végétale noble indique un vieillissement harmonieux. Retour crémeux sur la
finale. Excellent +
Saumur, Clos du Tue-Loup 2016 (terroir de sables limoneux) : troisième claque ! une grande élégance au
nez, avec un fruité profond et suave. La bouche possède de très beaux tannins,
dessinant un joli grain et laissant une empreinte veloutée. UN VIN **
Saumur Champigny, Montée des Roches 2017 : on est ici encore un cran au-dessus. Fruité très
sérieux, avec une vinosité au nez déjà superlative. Grande bouche de Cabernet
Franc, mûre, sans défaut ou faiblesse. C’est sérieux même si une garde de
quelques années est à prévoir (voir obligatoire). Tannins sur un équilibre sur
le fil. UN VIN **
Saumur, Clos de l’Etoile 2014 :
Grand Immense nez de Cabernet qui pinote !!! Pointe kirschée du
plus bel effet. Grande élégance des fragrances. Bouche sur un équilibre de
Grand Cru, déjà un peu fondue. Des tannins nobles, soyeux à souhait. Une
composante végétale noble, dégageant déjà une sensation d’amers bien
construits, qui viennent allonger le vin, apporter une vibration complémentaire
et titiller nos papilles. COUP DE CŒUR ***
Saumur Champigny, Clos Moleton 2012 : un nez sur l’élégance, avec une corbeille de fruits
plus apparente et plus immédiate (que le Clos de l’Etoile précédent). La bouche
est tannique mais fraîche, un peu marquée toutefois en finale, avec quelques
tannins encore accrocheur. On mesure ici le parcours qualitatif réalisé par
Arnaud en l’espace de quelques années. Très
Bien ++
Pour finir sur une des note(s) plus
tranquille(s) …
Crémant de Loire, 1948 rosé
(Cabernet Franc issu de la parcelle Clos du Midi sur le millésime 2015) :
finesse sur le fruit, légère tendresse sur une assise acidulée. Minéralité
fine, tendresse et élégance pour cette bulle de 4 heures.
Crémant de Loire 1948
(Chenin issu de la parcelle Coulée de St Cyr sur le millésime 2015) :
quelle « fausse » rondeur briochée pour cette bulle fine, tenue,
tendre et minérale. Une autre lecture des bulles que celle de Jacky Blot (ICI). UN VIN **
Coteaux de Saumur, L’Or de Brézé 2009 : aromatique très complexe, sur les fruits
exotiques, le caramel et l’ananas rôti. Superbe bouche qui semble avoir déjà
mangé une partie de ses sucres. Attaque ronde et plutôt exubérante, avec très
rapidement un retour sur le substrat minéral et le côté végétal tendu du
chenin. Grande longueur en bouche - pointe fumée complémentaire - laissant une
impression de finesse et d’élégance ultime. Excellent +
Changement de lieu ensuite, vers les chais
troglodytiques d'Arnaud, pour une dégustation complémentaire très instructive sur les
vins en cours d’élevage. Ou l’art de composer avec les fûts pour l’optimisation
des vins. Une vraie science !
Attention, ces impressions saisies au fil de ce périple
souterrain sont à prendre comme un témoignage instantané, et non pas comme une
synthèse analytique définitive (les vins étant encore en cours d’élevage et les
assemblages non réalisés). Un exercice pas si facile
finalement mais très instructif !
Clos David 2018
(tonneau C France) : énergie
(quelle énergie), complexité entre gras et tension, un côté presque
« facile » du vin.
Clos de la Rue 2018
(tonneau C France) : minéralité
saline, corpulence et élégance.
Coulée de St Cyr 2018
(tonneau Rousseau) : frais,
floral, léger perlant. Energique et puissant sur la finale.
Brézé 2018
Tonneau Rousseau :
finesse sur la menthe poivrée au nez, puissance maîtrisée en bouche, empreinte
superlative en finale.
Tonneau
François Frères : un boisé
mat à ce stade. Puissance en bouche, avec une empreinte grillée.
Brézé 2017 (tonneau François Frères) :
réduction torréfiée du plus bel effet. Grand vin en devenir au niveau bouche,
avec un équilibre et une complexité à confirmer.
Coulée de St Cyr 2017
Tonneau Rousseau :
boisé mat au nez. Energie en bouche, avec une note grillée en finale.
Tonneau
C France : un vin minéral,
gras et salin, malgré une phase de fermeture évidente.
Clos de la Rue 2017
(tonneau Rousseau) : puissance
sur la floralité, un boisé grillé en retour
Clos du Tue-Loup 2018 :
fruité, maturité, finesse des tannins.
Montée des Roches 2018 :
de la structure, des tannins sérieux et de beaux amers.
Clos Moleton 2018 :
du vin, avec des tannins très élégants, sur une base fruits confits.
Clos Moleton 2017
Tonneau Rousseau :
derrière la réduction, une charge tannique imposante, certes encore anguleuse
mais avec une belle définition.
Deuxième tonneau Rousseau : un vin plus « rond » et plus avenant,
avec des tannins polissés.
Tonneau Demptos :
du fruit et de l’élégance, des tannins crémeux.
Troisième
tonneau Rousseau :
un cabernet « bordelais », droit, strict, construit sur la puissance.
Tout l’art est de choisir a priori
(en connaissance des terroirs, de la maturité des raisins et des
caractéristiques intrinsèques du millésime) les proportions de chaque fournisseur pour que
l’assemblage final (issu de toutes les barriques d’un même cru) s’approche le
plus possible de l’optimum recherché pour le vin … pour notre plaisir futur. Le métier de
vigneron est aussi parfois de l’art.
En conclusion, nous tenons à remercier ici très
chaleureusement Arnaud Lambert qui nous a accueillis de la plus belle des
façons, en nous expliquant sa philosophie et en nous montrant quelques facettes de
son (passionnant) métier. Pour nous, simples passionnés de vins, ce furent des
instants rares et précieux, qui vont bien au-delà d’une simple dégustation.
Merci Arnaud.
Bruno
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire